"Couvrez ce sein, que je ne saurais voir.
Par de pareils objets les âmes sont blessées,
Et cela fait venir de coupables pensées."
Le Tartuffe, III, 2 (v. 860-862)
Symbole de la féminité, zone érogène somptueuse, nos seins sont un sujet très vaste de questionnement. Ce sujet devient le mien parce que j’ai encore été censurée pour une photo montrant une femme ravissante, poitrine naissante, et tétons apparents. Je sais bien que les tétons sont malvenus sur Facebook et je n’y peux rien malheureusement, à part m’insurger sur le décalage entre la vue magnifique sur des seins, la beauté, et la violence qui est omniprésente sur les réseaux sociaux et partout ailleurs. Je suis ce que je suis, j’aime un peu transgresser.
J’ai une clientèle mixte et reçois des femmes de tout âge et tout horizon. Je suis une femme et j’ai moi-même mon propre rapport avec mes seins. Si aujourd’hui je les aime et je m’aime, cela n’a pas toujours été le cas.
La plupart d’entre nous n’avons pas toujours aimé nos seins, et certaines ne les aiment toujours pas. Trop gros, trop petits, asymétriques, forme poire ou pomme, à la Jane Birkin ou dignes des couvertures de Playboy, trop, aréoles trop larges ou toutes petites, tétons rentrés ou trop gros, malformations, le cancer du sein, l’allaitement, souffrances diverses … A la puberté tout d’un coup notre corps change, beaucoup. Les hanches s’épanouissent, les poils poussent, nos règles apparaissent, les hormones … et notre poitrine pousse souvent douloureusement. Je me rappelle que je faisais du judo et que les prises, les gestes même petits qui touchaient mes seins, étaient tellement douloureux que j’ai arrêté ce sport.
Nos seins sont pourtant fièrement posés sur nos pecs, naturellement doux et plein de notre féminin. Nos tétons arrogants et réactifs au froid, au vent, au soleil, aux langues, aux caresses, frémissent si subtilement. Rien de plus efficace pour une femme en paix avec son corps qu’un massage des seins, auto massage pour entretenir son énergie sexuelle et même influencer sur son cycle et ses règles (pratique taoïste). Rien de tel qu’un toucher délicat et puissant de nos seins pour faire chauffer notre chaudron alchimique et mettre en route la sécrétion de notre temple. Rien de plus puissant qu’un tétage de tétons, voir plus encore 😊, pour sentir l’éveil de notre animalité et sensualité.
Rituel de transmission avec l’achat du premier soutien-gorge, plus ou moins réussi, avec nos mamans, gênées, fières, inquiètes ... Coton ou dentelle, représentation de la féminité particulière. Les regards des mères, des proches et des hommes, les représentations culturelles et symboliques dont leurs seins font l’objet échappent aux femmes. Elles n’ont pas de prise sur ce signe extérieur de leur identité. Et il n’y a pas d’entre-deux : soit ils sont assimilés à un objet érotique, soit à la maternité et à l’allaitement. La poitrine est à la fois un tabou et un cliché. Elle est dotée d’une dimension sexuelle, qui peut même être vulgaire et sale. Notre corps n’est pas un objet dont nous pouvons changer les pièces quand elles sont cassées. Nous devons en prendre soin. Et pour se réapproprier sa féminité, pour accepter cette zone si sensible et l’embellir, rien de plus efficace que de la toucher, en optant pour des gestes de bien-être simples, dénués de toute connotation sexuelle ou médicale. Insuffler de la vie, de la conscience dans la poitrine. Pour l’assumer et la faire rayonner, mais également parce qu’un organe dont nous nous soucions se défend mieux contre des agressions potentielles.
Honorons nos seins les femmes, chérissons-les, soyons fières de nos tétons. Envol de soutien-gorge et liberté de respirer librement sans carcan. Toutes nos potrines sont belles de tendresse et d’amour, de joie et d’impertinence, nos poitrines c’est la diversité du féminin, de la féminité.
Je nous aime les femmes ❤
13/06/2017,
nathalie Vieyra